Léonie.
Je comprend que tu te poses la question, moi aussi je me la suis posée, j'en ai beaucoup discuté avec mon compagnon également. En tous cas je suis d'accord avec Anne, c'est maintenant qu'il faut le faire pour au moins 2 raisons:
- Il faut que tu sois prête à porter en toi un bébé qui n'auras pas tes gênes, mais celui d'une inconnue et de ton mari.
- si tu décides de le faire mais que tu ne veux pas que l'enfant le saches, il faut choisir une donneuse qui a le même groupe sanguin que toi.
En ce qui me concerne, mon inquiétude réelle était en fait: comment
JE persevrais un enfant issu du don d'une autre femme? J'avais peur que ça me mette en "rivalité" avec une inconnue qui elle "fonctionnait" correctement. Une "fantôme" qui me hanterais quand je regarderai l'enfant que j'aurais mis au monde... J'avais peur que cet enfant concrétise mon propre échec et que je ne serais pas capable de l'aimer correctement.
J'ai conscience que ces mots sont très durs, mais encore bien d'autres choses trottaient dans ma tête. Est ce que je faisais ce choix uniquement pour mon compagnon, ou par désir d'une grossesse plutôt que d'un enfant. Après tout, il y a l'adoption même si c'est très long... Mais jamais je n'ai pu envisager l'adoption. L'idée que l'enfant ait un passé d'abandon ou pire, qu'il soit orphelin, me terrifiait.
Pourtant, tout c'est fait très vite dans ma tête. En quelques jours à peine, en parlant de toutes mes craintes avec mon compagnon, avec mes proches, et beaucoup ... avec moi même, J'ai réalisé que mon enfant, quelque soit la façon dont il est conçu, resterait mon enfant. En plus, cette question génétique était vite résolue: pour rien au monde je ne voudrais transmettre des gènes qui m'ont peut-être rendue infertile, ou un gène qui prédispose à certains cancers (il y en a dans ma famille) ou je ne sais quoi encore... c'est une façon très réduite de voir les choses (et très fausse car la loterie génétique est bien plus importante et que tout ne s'explique pas par la génétique), mais ça m'a aidé dans ma décision.
Finalement qu'est ce que je veux transmettre à mes enfants: rien d'autre que du bonheur, de l'amour, la meilleure éducation possible, mais franchement, mes gènes, mon apparence physique... non, je m'en fiche complètement si l'enfant n'a pas mon nez, ou la même forme d'oreille... En plus, il l'aura peut-être, par pur hasard, mais même si je m'aime beaucoup

, je crois que ce n'est pas assez pour vouloir un clone de moi... et même si j'aime mon homme, l'enfant ne sera pas non plus son clone, on est donc sur le même terrain!
Mon enfant ne sera pas qu'un assemblage génétique, qu'une expérience biologique (aussi fantastique soit-elle), c'est un être humain à part entière à qui l'on donne la chance d'exister, de grandir et de devenir autonome.
Depuis que j'ai vu pour la 1er fois mon test de grossesse positif, je peux te garantir que je considère complètement cet enfant comme le mien, et si un autre enfant venait "naturellement" ensuite, j'en serais tout aussi émerveillé et heureuse. Quand on y réfléchie, la différence génétique est de toute façon énorme dans une même fratrie. Y a qu'a voir à quel point je suis différente de ma soeur, alors que nous avons les mêmes parents.
Je crois aussi que la motivation des donneuses est essentiellement financière, mais c'est très bien comme ça. Cela ne fait pas d'elles de mauvaises femmes. Vu la lourdeur du traitement, la moindre des choses c'est qu'elles perçoivent un dédommagement. Je n'aurais pas beaucoup aimé l'idée que ma donneuse se sente "la mère" de mon enfant.
Je pense que c'est un peu comme quand on donne son sang, on espère qu'il soignera quelqu'un, mais c'est pas pour autant qu'on s'imagine vivre en lui...
Tu sais, une femme que je connaissais à peine m'a proposé ses ovocytes: elle ne savait pas que c'était anonyme et aussi compliquée. Mais même en lui expliquant les désagréments médicaux, elle aurait été partante, mais seulement pour moi. Devant son insistance, je lui ai demandé pourquoi, et elle m'a dit que jamais elle n'aurait pu imaginer sa vie sans enfant. Devant mon histoire, elle était bouleversée et c'est pour cela qu'elle me proposait ses ovocytes. J'étais émus aux larmes. J'ai ensuite appris que ma propre soeur et même sa fille se sont renseigner pour savoir si elles pouvaient nous aider...
Dès que le don devient une histoire personnel, lorsque les gens côtoient des couples en détresse comme nous, ils sont alors sensibilisés au problème, et là, on peut voir leur générosité et ce qu'ils sont prêts à endurer pour nous.
Mais tout cela est impossible à cause (ou grâce) de la loi sur l'anonymat. mais c'est un autre sujet.
Mais finalement,Léonie, la motivation de notre donneuse est-elle vraiment importante? que ce soit pour l'argent ou par pur altruisme, l'important c'est plutôt notre propre motivation: pourquoi veut-on à ce point d'un enfant?
est ce pour l'aimer?, est ce un besoin "viscéral" inexplicable? est ce pour transmettre nos gênes? est ce par pression sociale?
Personnellement, avec mon compagnon, si cet enfant tant désiré nous donne le bonheur de naître, il connaîtra la vérité. On pense que les secrets de familles sont nocifs et en plus, je me vois mal mentir à mon enfant sur sa conception.
Il aura son originalité mais sera unique comme chaque enfant sur cette terre.
On lui dira sans détour, de la façon dont ça se présentera, je ne crois pas qu'on puisse programmer les mots. On prépare de reportage photos de notre passage en tchéquie, je pense qu'on s'en servira de support quand il sera assez grand pour se questionner sur son origine "biologique". Ce sera une étape surtout pour nous je pense, un peu comme pour les parents adoptifs j'imagine.
Mais son identité restera celle qu'on lui aura donné: On l'a désiré, on lui a donné les moyens d'exister avec la possibilité technologique qu'on avait, et on l'a aimé comme des parents normaux!!! c'est comme ça qu'un enfant se construit. Comme tous les ado au monde, il nous fera des crises d'identité, il nous reprochera de l'avoir conçu et nous détestera autant qu'il nous aimera... Si ça n'arrive pas, je me dirais que ce n'est pas normal!!!!

Léonie, je comprend ton inquiétude par rapport au fait que tu craignes que tes enfants ne se percoivent pas de la même manière, mais franchement, c'est toujours le cas entre frère et soeur, même conçus de la même façon: "tu le préfères lui...." Mais si toi, tu es sûre de les percevoir de la même façon, tu verras que ces questions d'enfants que tu redoutes tant ne te poseront plus de problème. C'est peut-être ton enfant "naturel" qui se sentira différent, parce que lui, est arrivé de façon "banale"... Je crois vraiment que tout cela est une question de grande réflexion, de décision, et de communication, le tout saupoudré de beaucoup d'amour
Le choix du don de sperme ou du don d'ovocyte n'est pas un choix à prendre à la légère. Le choix de dire la vérité à l'enfant n'est pas plus simple. Il faut également penser à nos proches. Comment percevront-ils cet enfant? Si lui est au courant, il faudra sans doute également prévenir nos proches, parce que l'enfant, lui, en parlera certainement... en tous cas, ça sera son choix...
Voilà, léonie, je crois avoir fait à peu près le tour de mes propres réflexions sur ce sujet.
En résumé, je pense qu'il faut être psychologiquement prêt avant de se lancer dans cette aventure. Il faut se sentir sereine et bien réfléchir sur le choix à faire.
Je trouve génial que tu te poses ce genre de questions, c'est très important et ça montre que ce n'est pas un besoin égoïste ou capricieux que tu as. Tu te soucis du bien être de ta famille. Ce sont les bonnes bases à mon avis.