Coucou Mimi 15, Capucine, Fatoum, et toutes les autres !
Merci de vos témoignages et questionnements !
Je trouve qu'il est très important de réfléchir avant le don (lecture, rencontre avec un bon psy, discussion à bâtons rompus avec des amies, etc.) et pendant la grossesse (on a quelques mois pour cela!) à tout ce que cela implique, une grossesse, l'arrivée d'un enfant, le processus du don (l'abandon du réflexe de la transmission automatique de ses gènes, la question de l'existence de la donneuse ou du donneur...) pour recueillir ses propres réponses, pour être en paix avec soi, pour interagir avec les autres sans crainte, et pour l'enfant à venir.
Et avoir fait, comme Anne l'a noté, le deuil de l'enfant génétique (ça prend du temps).
Le rejet du don est, je pense, assez fréquent, spontané, plus que pour l'adoption, pour les gens qui n'ont pas été confronté à l'impossibilité d'avoir un enfant "naturellement".
Ma mère a suffisamment heurté avec son "Mais, il n'aura pas tes GENES !!!"...
et alors ? J'ai des gènes de prix Nobel de sciences ou de Miss Univers ?? Non, même pas !
:-)
Pour les angoisses liées à la possible difficulté à tisser le lien avec le bébé à venir, moi, je dirais que la relation se créée avec le temps, quel que soit le mode de conception de l'enfant !
Mon premier enfant est arrivé naturellement (par surprise!) et pourtant, enceinte, j'avais l'impression d'héberger un petit alien, sympathique certes, mais "autre", tout à fait étranger, passager clandestin dans mon corps.
C'était une pensée très présente et dérangeante, assez difficile à assumer (on est sensée être heureuse de se sentir "pleine", non ?)
Bon, ça ne m'a pas empêcher d'en parler, même à l'époque : même pas la honte de ne (déjà) pas être une mère parfaite, aimante, par avance, et épanouie ! Assumons nos failles, nos craintes !
A la naissance et les semaines suivantes, je l'ai scruté mon petit bébé, cherchant les ressemblances, et les dissemblances (mais où avait-il péché ses grandes oreilles??!) cherchant à apprivoiser son "étrangeté"... de nouveau né, tout ce qu'il y avait de plus normal !
On devient une maman au fil des mois, comme le papa qui n'existe en temps que tel que par la relation qui se met en place avec son enfant.
J'aime, je pense, infiniment plus mon fils maintenant que lorsqu'il n'avait que quelques heures, je le connais, je le reconnais comme mien.
On croit souvent, surtout avant d'avoir un enfant, que l'on va le reconnaître et l'aimer aussitôt, au premier regard, et quand le processus n'est pas immédiat, de nombreuses mères sont désemparées, se sentent de mauvaises mères. Je pense qu'il faut arrêter de se mettre la pression :
Accueillir un petit bébé, c'est toujours accueillir un petit inconnu, avec des gènes et un caractère bien à lui (même si là encore, on joue vite aux jeux des ressemblances : "Oh, il est colérique comme...") ;-)
J'attend maintenant une petite fille pour mai 2015, grâce à un don d'ovocyte. J'ai réfléchi pendant plus d'un an avant de me lancer. Bizarrement, je suis plus sereine qu'à ma première grossesse, car je sais que si elle est aussi une petite inconnue, elle est aussi très attendue, porteuse d'espoir, précieuse, tout comme son ainé.
Alors, oui, Mimi, prépares-toi aux réflexions, mais reste bien droite dans tes bottes:
si tu es claire par rapport à cette grossesse (on s'en fout de la façon dont a été fait un bébé, est-ce qu'on demande aux gens quelle position ils ont prise pour le faire... naturellement ??!) quand le mode de conception de ton enfant ne te posera plus trop de problèmes, je suis sure que les réflexions continueront de t'énerver, mais bon, chacun son vécu, le tien sera plus riche, ta pensée plus accueillante à la différence... des autres et de ton enfant à venir !
Et je suis sure que, par mimétisme, déjà, il te ressemblera beaucoup !!
Et Katouss, c'est une bonne idée le double don, de sauter vers l'inconnu à deux et d'essayer d'avoir un enfant vierge de toute névrose familiale, du moins en matière d'héritage génétique ! ça vaudrait sans doute le coup de vous faire accompagner sur ce chemin pour vous délester de certains bagages familiaux encombrants avant l'arrivée d'un petit.
Et Juma, au niveau des ressemblances :
moi, j'entend toujours que mon fils ressemble à son père (blond aux yeux bleus), parce qu'il est blond aux yeux verts (comme ma mère!) et que je suis brune (à l'âge adulte!) aux yeux noisette !
Les gens de ma famille repère la ressemblance, à mon avis plus nette de mon côté, mais les autres se basent sur la couleurs des cheveux.
Alors, ça m'énerve un peu qu'on ne voit pas qu'il me ressemble, mon fils, mais je me souviens que petite fille, je détestais que les gens me disent que je ressemblais à mon père (brun aux yeux bruns) car je voulais être comme ma maman (jolie, quoi !) et que ressembler à un homme, même son père, c'est pas un compliment pour une petite fille ! ;-)
Donc, l'important, ce serait de dire que le petit garçon ressemble à son père et la petite fille à sa mère, quelques soit leurs traits, pour que l'un soit valorisé dans sa masculinité et l'autre dans sa féminité.
Et puis, même "portrait craché" (pour mon fils, de son oncle maternel!) il a aussi de son papa, la fossette au menton (jolie signature!).
Donc, Juma, tu trouveras certainement des traits au bébé à venir qui seront de ton "côtés" ou que les autres percevront comme tel : "C'est tout le portrait de son papa, avec les beaux yeux/la bouche rieuse/le petit nez... de sa maman!"
Et pour les réflexions blessantes typique de l'adolescence que tu as évoqué, c'est une inquiétude légitime, mais si tu lis "Enfants du don" (cf. ci-dessous) tu verras que les enfants nés du don qui témoignent se sentent tant aimés qu'ils ne rejettent pas leurs parents, ceux qui les ont élevés et aimés.
Espoir et confiance en l'avenir de nos petits amours !
Je vous conseille à toutes/tous les ouvrages (et articles) de Geneviève Delaisi de Parseval, comme son dernier "Voyage aux pays des infertiles" chez Odile Jacob (sept.2014)
+ "Origines de la vie... vertiges des origines." Colloque sous la direction de René Frydmann et Muriel Flis-Trèves, PUF
+ "Enfants du don, procréation médicalement assistée : parents et enfants témoignent", Domique Melh, Robert Laffont
+ "La dette de vie. Itinéraire psychanalytique de la maternité", Monique Bydlowski, PUF.